Mail envoyé pour la consultation publique sur une demande d’octroi d’un permis exclusif de recherches de mines dit permis « Taranis » sollicitée par la société par actions simplifiée Breizh Ressources portant sur les départements de Loire-Atlantique, du Morbihan et d’Ille-et-Vilaine.
Par le présent courriel, je souhaite en ma qualité de députée de la 4ème circonscription d’Ille-et-Vilaine contribuer à la consultation publique pour la demande d’octroi d’un permis exclusif de recherches de mines dit permis « Taranis » sollicitée par la SAS Breizh Ressources. Si le projet TARANIS concerne 20 communes au total sur les départements du Morbihan, Ille et Vilaine et Loire Atlantique, 9 communes de ma circonscription sont impactées : Bains sur Oust, Sainte Marie, La Chapelle de Brain, Renac, Saint Just, Sixt sur Aff, Saint Ganton, Langon, Sainte Anne sur Vilaine.
Au-delà de l’impact territorial, cette demande de permis vient interroger une stratégie nationale de relance de l’activité minière sur le territoire français et européen, aux mains des intérêts capitalistes privés.
La demande de permis est déposée par la SAS Breizh Ressources domiciliée à Lorient. Dans les faits il s’agit d’une filiale de la société Aurania Ressources, société de droit canadien appartenant au milliardaire Keith Barron. Accorder un titre minier à Breizh Ressources ne renforce donc aucunement la souveraineté de la France dans la connaissance de son sous-sol et sa capacité éventuelle à l’exploiter. La société Breizh Ressource indique dans son dossier rechercher en premier lieu de l’or. Le terme or ou l’adjectif « aurifère » est ainsi récurent. Le milliardaire Keith Barron est connu pour avoir fait fortune en revendant une mine d’or en Equateur avec une très forte plus-value. Je m’interroge donc légitimement sur ses ambitions et les motivations de la demande d’exploration. En effet l’or ne constitue pas un métal nécessaire à la transition énergétique selon l’annexe 1 de la Stratégie Nationale Bas Carbone n°3 (novembre 2024). L’or est par contre très rentable. En tant que députée je ne peux accepter que le sous-sol de notre territoire soit placé entre les mains d’investisseurs privés qui cherchent la rentabilité. Je défends au contraire une intervention et une maitrise par la puissance publique de notre politique énergétique et de nos modes d’approvisionnement.
La phase d’exploration ne peut être dissociée de sa finalité, à savoir l’exploitation minière. Pour apprécier au plus juste l’impact d’un permis d’exploration minière, il faut donc être en capacité d’analyser l’impact local sur l’environnement et les populations d’une ouverture de mine. Le code minier trace en effet un continuum entre l’exploration et l’exploitation. Le détenteur d’un titre d’exploration minière se retrouvant dans une situation de monopole pour une exploitation ultérieure. C’est dans cette situation de monopole potentiel que réside l’intérêt de Breizh Ressources en vue d’une revente du titre à des compagnies majors. La société Breizh Ressources ne dispose en effet pas de l’infrastructure pour assumer une exploitation minière. Les engagements que Breizh Ressources prend concernant l’impact d’une mine n’engage qu’elle, et ne contraignent nullement un futur exploitant. L’autorité environnementale reconnait elle-même l’exploitation minière comme la phase ultérieure dans son avis de février 2025. Il est ainsi indiqué « Il est important que les incidences possibles de la phase ultérieure d’exploration approfondie et ensuite de celle d’exploitation soient anticipées dès l’étape des permis » (p16). Or à ce stade, dans le cas précis de Taranis, les conditions d’une exploitation minière respectueuse de l’environnement et des populations ne sont pas connues.
Sans même aller jusqu’à l’exploitation, la phase d’exploration n’est pas conséquence sur le milieu environnant. Dans son avis, l’autorité environnementale identifie deux enjeux majeurs : la préservation des habitats naturels et de la biodiversité, et la préservation de la ressource en eau. En ce qui concerne la biodiversité, il y a urgence. Au cours des cinquante dernières années, la taille moyenne des populations d’animaux sauvages a diminué de 73%. Un million d’espèces sont menacées de disparition dans les décennies à venir. Il faut donc tout mettre en œuvre pour préserver la biodiversité locale.
L’impact sur la ressource en eau est un enjeu qui m’inquiète particulièrement. L’autorité environnementale indique que Breizh Ressources ne prend pas en compte l’état actuel des masses d’eau. Or précisément sur le territoire, il s’agit d’un point critique. En Ille et Vilaine 97% des masses d’eau sont en mauvais état. L’eau est clairement un facteur limitant pour le développement du département, en quantité et en qualité. Le Schéma d’Aménagement et de Gestion de l’Eau – SAGE Vilaine est d’ailleurs en cours de révision. Les sources de tension sont déjà nombreuses sur la gestion de l’eau dans le futur. Il n’apparait pas opportun d’aggraver cette tension avec un projet minier. D’une part au niveau quantitatif l’exploitation d’une mine nécessite une forte consommation. D’autre part au niveau qualitatif, le cycle de l’eau souterrain sera perturbé avec des risques de pollution invisible. L’autorité environnementale reconnait que les forages réalisés pendant l’exploration peuvent traverser les nappes d’eaux souterraines. Il est aussi indiqué page 31 que « la vulnérabilité des principales nappes d’eau souterraine mentionnées (dans l’avis) apparait comme un facteur important à prendre en compte ».
Au mois de janvier et février 2025, la Vilaine a connu une fore crue en aval. Nous savons qu’à cause du réchauffement climatique, ces phénomènes se répéteront de plus en plus souvent dans le futur. Cela constitue donc un facteur de risque supplémentaire pour tout projet minier sur le territoire. L’impact local d’une activité minière n’est en effet pas strictement localisé au site d’extraction. Le risque de drainage dans la gestion des résidus miniers peut impacter un espace géographique élargi.
Au regard de ces éléments, je considère que le projet TARANIS ne répond pas à une logique d’intérêt général et qu’il constitue un danger pour le territoire.
Les investissements capitalistiques miniers comme ceux d’Aurania Ressources ne sont pas fléchés au regard des besoins de la bifurcation écologique mais dans une logique de profits et de surconsommation. Notre sous-sol constitue un bien commun que nous ne pouvons pas laisser à la main de multinationales. Je m’interroge d’ailleurs sur le fait que la région Bretagne aie été exclue de l’inventaire des ressources minérales confié au BRGM en 2023. Il est nécessaire d’interroger les besoins de la société et de mettre en place une stratégie nationale de sobriété métal. L’Etat doit jouer un rôle central dans cette transition écologique.
Un réel débat démocratique et public est nécessaire sur l’usage des minerais et des métaux dans une optique de sobriété. Je demande à ce que le ministère de l’économie rende public les avis des différentes administrations publiques sollicitées dans le cadre de l’instruction de la demande du permis TARANIS.
Mathilde Hignet